Par où ta rentrée ? On t’a pas vu sortir

Entretien avec J. Santitre, un auteur qui ne sort pas de livre en cette rentrée littéraire.

– Santitre, c’est votre vrai nom ? Ou c’est un pseudo d’écrivain ?

– C’est mon vrai nom.

– Bon, je vous ai googlisé et, vous vous en doutez, je ne vous ai pas trouvé. En revanche, Wikipedia liste plusieurs œuvres qui portent votre nom (ou presque), Sanstitre : par exemple, une nouvelle de Tchekhov. Vous l’avez lue ?

– Euh…non. Cela dit, c’est de famille. Ma cousine Sylvie n’a pas lu Sylvie écrit par de Nerval et je connais une nana qui n’a rien lu de Zola ! Si ! Si !

Lire la suite « Par où ta rentrée ? On t’a pas vu sortir »

Bonne heure de la rentrée littéraire : 18h00

À lire à l’heure

21919329« Le maquilleur-coiffeur passait à 18 heures, la taille ceinte d’une pochette débordant de pinceaux, il repoudrait le front de l’une, appliquait de l’anti-cernes sur le bouton d’une autre, retraçant le tremblé d’un trait d’eye-liner ; son souffle mentholé et tranquille caressait les joues, le son caoutchouteux de la gomme qu’il mâchait en permanence tenait lieu de berceuse, les filles somnolaient dans une brume de laque. »

Chavirer de Lola Lafon

Bonne heure de la rentrée littéraire : 09h00

À lire à l’heure

61SsdLOz4rL« Le troisième jour le vent est tombé et nous avons pu disposer le petit déjeuner sur la terrasse. Justine et Louis se sont disputé la place face à la mer. Brune leur a rappelé la règle d’alternance d’un repas à l’autre, et intimé d’arrêter leur chahut. La famille voisine ne méritait pas qu’on lui casse les oreilles dès 9 heures du matin. Eux étaient cinq, nous étions quatre, était-il normal qu’on n’entende que nous dans toute la résidence ? La question n’appelait pas de réponse et les enfants se sont tus. »

Un enlèvement de François Begaudeau

Bonne heure de la rentrée littéraire : 07h00

À lire à l’heure

product_9782072860829_195x320« Dans un roman d’une grande tension, Erri De Luca reconstitue l’échange entre un jeune juge et un accusé, vieil homme «de la génération la plus poursuivie en justice de l’histoire d’Italie». Mais l’interrogatoire se mue lentement en un dialogue et se dessine alors une riche réflexion sur l’engagement, la justice, l’amitié et la trahison. »

« Q. Je vous demande tout de même de revenir sur votre journée.

R. Je me réveille tôt, vers 5 heures. J’attends 7 heures pour descendre dans la salle à manger et prendre mon petit-déjeuner. »

Impossible d’Erri de Luca

Bonne heure de la rentrée littéraire : 16h45

À lire à l’heure

31mTsDbKgpL« Maintenant son chien se lève parce qu’il a entendu que quelqu’un arrive, ou qui n’est pas encore arrivé, mais il sait que c’est l’heure, entre seize heures quarante-cinq et seize heures cinquante-cinq, selon les difficultés de la circulation. Au bout du chemin caillouteux qui conduit du hameau à la route mal goudronnée où on laisse les conteneurs à poubelles, route qui rejoint la départementale qu’on prend pour aller dans le bourg de La Bassée, le car scolaire va s’arrêter, sa porte s’ouvrir, et Ida, avec deux enfants des hameaux voisins, en sortira. À peine la porte se sera refermée dans son bruit de suspension hydraulique, que les trois enfants se sépareront ou ricaneront encore deux ou trois minutes, échangeront encore deux ou trois mots, puis ils partiront aussitôt l’un vers l’ouest, l’autre vers l’est, le troisième au nord ; Ida marchera et gardera les mains sur les bretelles de son cartable, sans s’intéresser à la route devant elle – elle connaît trop le moment où la route mal goudronnée, fatiguée, creusée par les suc-cessions d’hiver, d’été, de froid et de pluie, de chaleur et des roues des tracteurs, tourne sur la gauche en laissant la bande de goudron devenir un chemin de gravier blanc, aveuglant en été mais boueux le plus souvent, et presque roux alors, ou plutôt ocre, jaune, comme comme il est maintenant, chargé de la flotte qu’il a plu toute la nuit et ce matin encore, encombré de flaques marronnasses profondes et larges qu’elle doit contourner et qu’elle s’amuse parfois à enjamber, avec, au bout, le hameau et les toits des trois maisons, des granges et de l’étable, chez elle, les toits verdis par endroits à cause de la mousse et des végétaux qui ont envahi les murs et ont proliféré jusqu’en haut des toits ; il y a le hameau, comme un poing fermé au milieu des champs de maïs et des pâturages où les vaches passent leurs journées à brouter; il y a aussi des arbres qui longent la rivière séparant la terre en deux départements ; de l’autre côté, une église en pierre blanche de tuffeau, et ici, de notre côté, les peupliers, comme une armée au garde-à-vous, en rang d’oignons, longeant et ombrant la rivière. Mais tout ça c’est déjà assez loin, à pied il faut du temps pour y accéder, et traverser aussi cette espèce de minuscule bois sauvage, comme un carré d’arbres parqués dans les champs, des arbres dont on entend les feuilles et les branches bruisser dès que le vent vient de la bonne direction, apportant aussi le chant des oiseaux et où vivent les renards qui traînent un peu trop près parfois – on en a vu un dans la cour, très tôt un matin avant de partir à l’école. »

Histoires de la nuit de Laurent Mauvignier

Bonne heure de la rentrée littéraire : 15h00

À lire à l’heure

9782330135218Zhu Yu, âgée de vingt-six ans, fille de Zhu Men-fei, propriétaire du restaurant Big Menfei dans le Chinatown de New York, venait d’arriver pour passer un week-end à Las Vegas où, avait dit Menfei, elle devait rejoindre une amie nommée Beatrix Meadow-Jones. C’est cette amie qui, inquiète de ne pas voir arriver Zhu Yu à leur rendez-vous à quinze heures devant les fontaines du Bellagio et de constater que son téléphone sonnait dans le vide alors qu’elle avait pu la joindre deux heures plus tôt pour s’assurer qu’elle était bien arrivée à Las Vegas, avait alerté la police. »

Le Bon, la Brute et le Renard de Christian Garcin

La rentrée littéraire 2019 à petits pas, petites pages

Sa rentrée littéraire, il la voit moins grande que d’autres. Il se la représente par petites touches. Moins impressionnante, qu’impressionniste. Les petites touches de petits éditeurs qu’il imagine indépendants. Des livres qu’il n’a pas lus, mais qui éveillent sa curiosité. Il leur offre un peu de voix aux chapitres.

maria-stefanopoulou-athos-le-forestier-couv

Athos le forestier de Maria Stefanopoulou, éd. Cambourakis
Traduit par René BouchetUne histoire de résistance, de forêt et d’ermite. Les ermites, ça lui parle.

« Le 13 décembre 1943, une tragédie a frappé la ville de Kalavryta : en représailles aux actions des résistants grecs, les soldats allemands ont assassiné tous les hommes présents. Parmi eux, Athos est laissé pour mort. Afin de surmonter son traumatisme, il se réfugie dans la forêt, qu’il ne quittera plus qu’à de très rares occasions, laissant sa femme et sa fille dans le doute quant à sa disparition. »

 

La mort du fer de Serge Simon Held, Edition L’arbre vengeur

d7w18l7wsai4m3w

(une réédition)Chaos, Apocalypse et Anticipation.

« La maladie bleue s’attaque aux métaux qu’elle détruit impitoyablement et se répand dans l’Europe avant de gagner le monde entier. »

Francis Rissin de Martin Mongin, éditions Tusitala

francis-rissin-couv-190x140mm

Politique fiction.

« De mystérieuses affiches bleues apparaissent dans les villes de France, seulement ornées d’un nom en capitales blanches : FRANCIS RISSIN. Qui est-il ? Comment ces affiches sont-elles arrivées là ? La presse s’interroge, la police enquête, la population s’emballe. Et si Francis Rissin s’apprêtait à prendre le pouvoir, et à devenir le Président qui sauvera la France ? »

Trafalgar d’Angelica Gorodischer, éditions La Volte

index

Un VRP qui va de planète en planète qui se transforme en ethnologue du futur.

« Trafalgar Medrano n’est pas n’importe quel commercial. Certes, comme beaucoup de marchands et autres conseillers de vente, il aime parler. Raconter son quotidien professionnel en buvant sept double cafés entrecoupés de temps en temps par une cigarette, quand il ne les fume en parallèle. Car il en a des choses à dire, Trafalgar Medrano. Et pour cause, ses voyages l’entraînent de planète en planète à la rencontre de populations toutes plus originales les unes que les autres, en des lieux où le vraisemblable n’a plus lieu d’être… »

L’Affaire suisse de Jean-François Paillard, éditons Asphalte

couv-suisse-rvb-lo-480x680

De l’espionnage dans les milieux financiers suisses. Le quotidien d’une taupe. Il a toujours bien aimé les taupes.

« Narval revient d’un boulot compliqué à Marseille et retrouve sans enthousiasme ses collègues porte-flingues. Rapidement, leur supérieur, le parrain Pépé Bartoli, lui confie une nouvelle tâche : aller récupérer un magot en Suisse, le butin d’un casse effectué quinze ans auparavant par Bartoli lui-même. »

Agbogbloshie

G00831Euh un blog sur la série Banshee ? Non. Agbogbloshie.

En lisant le roman de Guillaume Poix, il apprend à prononcer le mot Agbogbloshie que son roman Les Fils conducteurs a pour fil conducteur.
Ce livre publié sur une poubelle est un fil d’Ariane proposé pour se sortir d’une minotauréenne banlieue ghanéenne où demeure la grande décharge à ciel ouvert de nos déchets électroniques. Rien à voir avec ces poubelles d’Amérique du Sud remplies d’espoir (des livres sortis des poubelles)

Les Fils conducteurs. Un livre essentiel sur ce ravage barjavelien, orwellien et tristement moderne.
Delirium immense. Néant au Ghana. Lire la suite « Agbogbloshie »

La rentrée littéraire à petits pas

indexSa rentrée littéraire, il la voit moins grande que d’autres. Il se la représente par petites touches, à petits pas. Les petites touches, les petits pas de petits éditeurs (deviendront plus grands) qu’il imagine indépendants.

La rentrée n’est pas triste puisqu’il n’a pas lu tous les livres, notamment ces romans qu’il va évoquer. Lire la suite « La rentrée littéraire à petits pas »

LA RENTRÉE LITTÉRAIRE LE REND TRÈS LITTÉRAIRE…

page156-712px-Apollinaire_-_Alcools.djvu (1)C’est la Rentrée littéraire. Il a encore plus soif de livres que d’habitude, l’eau à la bouche, la soif de l’ivre, de Lignes Tonic. Ouvert à tout. Il prend la prose dans l’attente d’un vers. Un dernier pour la route, un page-turner, un inédit, un class’hic !

On a beau lui répéter que la rentrée littéraire a un côté « Raccrochez, c’est une éraire ! », il s’obstine. Il veut prendre l’appel, la peine de zyeuter, de fouiner, de trouver.

Il croit encore au noble art. Pas question de jeter l’éponge devant cet ouragan de boxe.

Lire la suite « LA RENTRÉE LITTÉRAIRE LE REND TRÈS LITTÉRAIRE… »