Bonne heure littéraire : 05h00

À lire à l’heure

Ce document a été créé et certifié chez IGS-CP, Charente (16)« Ce matin-là, je me rappelle, je l’ai testé, le magnéto. Puis plus capable de dicter quoi que ce soit. Aussi essayé la machine. Tapé n’importe quoi d’abord, voir si elle imprimait. Tapé des phrases ensuite, voir si ça sonnait bien. Un désastre. Je me masquais vite fait. J’aimais pas du tout ce que je fais. Je me promenais lugubre dans la baraque, le chapeau sur la tête, un petit cigare au coin de la gueule, à me regarder dans toutes les glaces, voir si j’ai une tête d’écrivain. Conclusions très imprécises. Avec bada, je ferais peut-être pas mal au dos d’un polard. Le crépuscule des ringards, par Henri Butron. Ou bien pas de bada, pas de photo sur le bouquin, quelques-unes seulement dans la presse, si j’ai un prix ou du piston. Le bretzel moisit à 5 heures, d’Henri Butron, une œuvre forte, un talent original, à lire à la plage. Je serais pas capable, j’ai peur.
Je suis ressorti, voir chez le libraire. J’ai acheté ce qui se vendait bien, pas bien-n’importe comment, bien-régulièrement, bien d’une façon soutenue. Sagan, Troyat, et des intellectuels, Jules Roy, Claude Simon, le Maréchal Juin ; je suis pas sûr que l’homme m’a pas refilé n’importe quoi, prétendant gros tirage. Quand on lit les best-sellers, ils ont l’air bien faciles à écrire. J’essaie donc, j’essaie encore, je n’arrive qu’à des pastiches de quatre ou cinq lignes, et même pas ressemblants.
Je stoppe. Ce n’est que le premier jour. Je ne suis pas découragé. J’ai bien raison. Je réfléchis. »

L’affaire N’Gustro de Jean-Patrick Manchette

À Bléville on espère une moisson rouge

 

À Bléville on espère une moisson rouge.

C’est drôle le nom de ce quartier du Havre où on s’agite en attendant les municipales.
Bléville, c’est un joli nom, camarade. D’autant plus quand il y a une campagne municipale livrant aux urnes le gouvernement du pognon de dingue et une opposition qui a le look coco.
Bléville, comme un symbole.
Bléville et ses joyeux drilles littéraires ne pouvaient faire cette économie de marché. Lire la suite « À Bléville on espère une moisson rouge »

Bonne heure littéraire : 15h00

À lire à l’heure

unnamed« Une voix de bouseux. Il criait dans le téléphone, lui aussi.
— Ouais, j’ai grogné.
— Monsieur Tarpon le détective ?
J’ai regardé ma montre et j’ai pensé merde car elle disait 3 heures et c’était incontestablement de l’après-midi. Ça m’apprendra à faire des excès. Physiques et d’alcool et de zèle. Poil aux ailes. »

Morgue pleine de Jean-Patrick Manchette.

Bonne heure littéraire : 01h00

A lire à l’heure

86481721_o« Il gagna sa chambre, se débarbouilla, se mit en pyjama, prit le téléphone et demanda le numéro d’Alex. Il était une heure du matin. S’il la réveillait, ce serait bien fait pour elle. Mais il obtint de nouveau le répondeur automatique. Il attendit le top sonore. Il n’avait rien à dire à Alex.
— Tu peux garder le chat, idiote, dit-il. »

La position du tireur couché de Jean-Patrick Manchette

Fatale, la méchante de Manchette

875874C’est le roman noir d’un des auteurs que le romancier David Peace qualifie de Great Red Writers dans sa préface à l’édition anglaise (grands écrivains rouges où on retrouve Dashiell Hammett et Sjöwall et Wahlöö).

C’est un livre mal reçu à sa sortie et refusé à la série noire.

Aimée Joubert est une femme border line. C’est la méchante de ce Manchette. Méchante ? Question de point de vue. Sa cible de Serial-Killeuse is Riches. Elle assassine les notables de Bléville (quelle ville ! quel nom !). Une ville pleine de fric et de freaks.

Elle se faufile, elle se dissimule, cette maigrelette qui aime la choucroute. La Faucheuse descendue sur terre se métamorphose. Brune, blonde, rousse, mais toujours incendiaire. Elle avance masquée. Elle en a besoin pour s’approcher à moins d’un mètre (virus gauchiste qui rompt sournoisement la distanciation sociale) de ceux qui transforment la vie en pourriture, qui engendre un monde corrompu.

C’est une bourgeoisie de province où la Bovary se mettrait à lire des romans policiers (jamais cités) et filerait à coup de canon de l’arsenic à tous les notables.

Pour l’happy end le lecteur repassera.

Fatale deJean-Patrick Manchette (1977)

Bonne heure littéraire : 8h30

À lire à l’heure

875874« Elle prit une chambre à l’hôtel, s’éveilla automatiquement à 8h30 comme elle l’avait décidé. Elle commandait plutôt bien à son propre corps. À une autre époque de sa vie, elle s’était trouvée aliénée sur beaucoup de plans. Notamment elle ne pouvait alors dormir sans des doses fortes de barbituriques, ni s’éveiller vraiment sans des doses fortes de toniques, ni supporter son mari et le reste de son existence sans une quantité de coupe-faim et de tranquillisants, à quoi s’ajoutaient des verres de vin. Mais à présent les choses étaient changées. Aimée commandait à son corps ; elle s’était endormie instantanément ; elle s’éveilla à l’heure qu’elle avait choisie. »

Fatale de Jean-Patrick Manchette (1977)

Jean-Patrick Manchette et l’art anar

arton202-4f242C’est un livre qui s’adresse à ceux qui aiment la littérature et le polar, un art anar.
En littérature policière ‘Se retrousser les manches’ se dit ouvrir un Manchette (1942-1995). C’est de la littérature qui stimule, qui ne simule pas son engagement. Y’a qu’à lire Nada. Rire noir en série noire. Lire la suite « Jean-Patrick Manchette et l’art anar »

Bonne heure littéraire : 20h22

À lire à l’heure

41QIst44ldL._SX210_« Alonso monta à l’étage avec un gros volume de Clausewitz. Il se fit couler un bain brûlant, se dévêtit et entra dans l’eau en grimaçant. Il avait posé son Colt sur le couvercle des cabinets à côté de la baignoire. Il s’installa dans l’eau en poussant de petits soupirs de gêne ou d’aise. A 20 h 22, le très puissant avertisseur Lynx-alarm installé dans le grenier de la demeure se mit en marche car Gerfaut et Gassowitz venaient de forcer la grille d’entrée de la propriété. »

Le petit bleu de la côte Ouest de Jean-Patrick Manchette(1976)