
Encore une nuit de merde dans cette ville pourrie (paru en 2004, traduit en français en 2007). Nick Flynn a raconté sa vie. Sans SAV. Sans Service Après Vie. Du brut de décoffrage quand on retrouve son père dans un foyer de sans abri. Années 80, dans le foyer de Pine Street, à Boston, la vie vous bastonne. Une bonne claque. Encore une nuit de merde et la vie qui vous nuit grave.
Et voilà une vie qui, dans ces pages d’un témoignage personnel, se transforme en existence.
Deux vies croisées. Jonathan. Nick. Un père, un fils. Et Manque. Ces jeux sont des faits têtus. Accidentellement, la vie vous livre son devis. Et il faut payer comptant.
Histoire de famille comme il y en a tant. Trop.
Un enfant abandonné. Une mère suicidaire. Un père disparu.
Paternité niée. Alcool. Saoul sans un sou. Solitude. Perdu de vue depuis vingt ans, reparu parmi ceux que les condescendants nomment les sans-dents. Invisibles qui cherchent de la chaleur dans de vieux journaux ignorés par ces Invincibles qui vivent de la lumière quotidienne des journaux. Père perdu dont on a retrouvé la trash. Reparu. En lieu et place d’une figure paternelle, un paternel défiguré. Retrouvé comment ? Dans l’exercice de son métier de travailleur social. C’est en travaillant pour les sans-abri que Nick Flynn retrouve la trace de son père. Qu’on croit en Dieu ou en Bourdieu, quelle histoire à serrer les dents.
Du noir, bien serré. Du vrai. Pas du chiqué.
Deux destins d’écrivains. Le fils a réussi. Il tient de son père le titre de son livre : « Encore une nuit de merde dans cette ville pourrie ». Un père qui se rêvait de la trempe de Twain, de Salinger avec ses pages blanches ou raturées qui n’ont nourri qu’un marginal. Et un fils qui a réussi comme écrivain (entre poésie et (auto)biographie ; le livre est aussi composite et emprunte à plusieurs genres : lettres, théâtre…), mais pour qui il est dur de se sortir de cette vie de merde hantée par la prison, la drogue et une vie familiale tragique. La mauvaise pente qui dure.
Le vrai n’est parfois pas vraisemblable.
Et puis, quelques années plus tard, le livre devient film. Il y perd son tonitruant titre : Being Flynn ou Monsieur Flynn. Et le père, De Niro. La mère, c’est Julianne Moore. Pas un casting de merde pour cette vie pourrie.
Le livre s’ouvre sur du Beckett
HAMM – Salopard ! Pourquoi tu m’as fait ?
NAGG – Je ne pouvais pas savoir
HAMM – Quoi ? Qu’est-ce que tu ne pouvais pas savoir ?
NAGG – Que ce serait toi.
Fin de partie
On ne sait pas s’il se referme.
…
Et d’autres … ‘Well Wellings’ …
https://allpoetry.com/Nick-Flynn
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