
À lire à l’heure
« Dans certaines circonstances quand il n’est que 17h15, 20h30 ça peut vous paraître le bout du monde. Je devais attendre. Prendre mon mal d’amour maternel en patience. Retour au Smartphone. »
Il n’y a pas de passé simple de François-Henri Soulié
Marcelle Tinayre (1870 – 1948), sous le pseudonyme Gilbert Doré:
‘La Chanson du biniou’ – Nouvelle
« La mère le Bihan se mourait d’inquiétude… ♫ Huit heures et demie ♫ venaient de sonner et Maria-Josèphe n’avait point paru à Carnac. Était-ce possible ?… Elle était partie vers midi, en même temps que M. Léris, l’un vers le Ménec, l’autre vers la plage… — La pauvre vieille ne se doutait guère que les deux promeneurs s’étaient rejoints après un détour. — Robert était rentré vers cinq heures, disant qu’il avait aperçu la jeune fille du côté du bois de pins… On avait servi le dîner. M. Léris avait mangé sans dire une parole et maintenant il partageait visiblement l’angoisse de la mère le Bihan. À huit heures et demie, celle-ci, les bras levés au ciel, avait déclaré que, bien sûr, sa petite-fille était tombée dans une ronde de Korrigans qui l’avaient emportée. Mais un Breton du Finistère, plus expert en ces sortes de choses, avait répondu que les Korrigans — c’est notoire — ne sortent jamais que par les soirs de lune. Alors la vieille avait émis l’idée que la Liévine qui passait pour chasser la fièvre en parlant au diable et en imposant les mains, avait, bien sûr, jeté un sort à sa chère enfant.
Vers neuf heures, la porte craqua et la servante déclara que l’âme de la jeune fille venait demander des messes. Mais Maria-Josèphe bien vivante quoique pâle, les yeux cernés et les cheveux mal rajustés sous sa coiffe, parut sur le seuil.
Yann la suivait.
— Madame le Bihan, dit-il, n’ayez point de peine.
J’ai rencontré votre demoiselle au Ménec. Elle était fatiguée, un peu malade, et les éclairs lui avaient fait si peur qu’elle en était comme morte. Alors je l’ai ramenée et je vous assure qu’elle n’a pas de mal.
— C’est vrai, ça, ma fille ? dit la vieille.
— C’est vrai, dit Maria-Josèphe en s’avançant au milieu de la salle. C’est vrai, reprit-elle d’une voix grave et haute, comme il est vrai que Yann est de tous les hommes du monde celui que j’estime le plus, et que je serai bientôt sa femme, s’il vous plaît, grand’mère, et s’il plait à Dieu.
La mère le Bihan fut tellement suffoquée par la joie qu’elle s’en assit de surprise, les jambes coupées, sa figure joviale pâlie jusque dans ses rides.
— Oui, dit Yann triomphant et d’un air de défi, oui, Maria-Josèphe est ma promise, et personne n’osera me la disputer, personne, pas vrai, Maria ?
— Non, dit-elle, personne.
⁂
Pendant que la vieille embrassait les fiancés à tour de rôle, Robert Léris, sans être vu, avait gagné sa chambre.
Le lendemain, furieux et confus, un peu triste peut-être, il quittait Carnac pour n’y jamais revenir. »
Source : https://fr.wikisource.org/wiki/La_Chanson_du_biniou/14
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Voltaire (1694 – 1778)
Correspondance : année 1751
2197. — À M. DARGET.
À ♫ huit heures et demie du soir ♫
, ce dimanche, 1751.
Mon cher ami, je reçois votre consolante lettre ; n’en soyez point en peine, je vous garde toutes celles que vous m’avez écrites. Nous avons bu à votre santé avec MM. de Cagnoni et Bodiani, quoique je ne boive guère : car, en vérité, mon état est bien éloigné des plaisirs. Il est vrai que le juif, ayant demandé à faire serment sur des points contestés, a été déclaré, par la sentence, personnellement indigne de faire serment, et que l’affirmation m’a été adjugée : ainsi tout est absolument pour moi dans l’arrêt, sans en excepter la moindre clause. Le juif est assez fou pour en appeler ; il est bien cruellement et bien mal conseillé. J’ai écrit au roi comme je vous l’ai dit : c’était la lettre d’un malade qui n’envisageait que la vérité, mon attachement pour lui, et la mort qui finit tout. Vale.
Source : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1751/Lettre_2197
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