La présentation d’un roman lui a récemment sauté aux yeux. Comme une mouche dans le lait qui lui fait un clin d’œil, comme une coquille qui n’en serait pas une, mais presque.
Le résumé de ce livre commence ainsi :
« La veille de son mariage, Anna apprend le décès de son père, Noel, victime d’une avalanche en Suisse. »
« Anna apprend le décès de son père, Noel »
Père Noel ? Une virgule qu’on ôte et, en plein mois de mars, c’est une hotte qui surgit. « de son père, Noel » devient ‘de son père Noel’.
Le diable est dans les détails. Satan et Santa réunis.
Léger. Il s’amuse. « Victime d’une avalanche » ? Une avalanche de cadeaux peut-être.
Hot. Il s’inquiète. Le décès du père Noël rappelle furieusement son meurtre tel qu’il fut décrit par Pierre Very, dans son roman, L’Assassinat du Père Noël (« Mais quel est ce mystère qui trouble la paisible bourgade de Mortefont ? On a dérobé les diamants de la châsse de Saint-Nicolas et assassiné le père Noël… »)
« de son père, Noel » relève un peu du kakemphaton (autre exemple, ici). Y a maldonne et ça mal sonne, avec ou sans tréma (Noël/Noel).
« Tout ça, c’étaient les idées de son père. Noel, le poète. »
Du Père Noël aux enfants, il n’y a qu’un pas. Dans la neige.
Chaque année, lors du repas du réveillon, on entend crier dans les chaumières « On mange, les enfants». Formule qui ne doit pas être confondue avec « On mange les enfants » qui pourrait servir de blurb à une nouvelle version de Barbe bleue.
Pour parodier l’incipit du roman « L’espionnage n’est pas un problème de maths. », disons que la lecture peut être un problème de virgule.
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Pour finir, une petite phrase latine qui a son double sens selon la place qu’on assigne à la virgule : “Si omnes consentiunt ego non dissento”
Ou Si omnes consentiunt, ego non dissento.
Si tous acceptent, moi je ne m’oppose pas
Ou Si omnes consentiunt, ego non, dissento.
Si tous acceptent, moi pas, je m’oppose.
(à l’article “Ponctuation” de L’Encyclopédie de Diderot)