C’est un essai comme une tentative de prôner le refus de parvenir, d’arriver, d’être en haut, au sommet d’une pyramide du haut de laquelle on contemple des siècles de dominés.
Le titre en rouge claque comme un Fluctuat qui préfèrerait faire son Mergitur.
La voile est hissée et tissée de l’expérience d’un navigateur dont la philosophie fut un jour de ne pas arriver là où il était attendu. Comme un Bartleby qui aurait fait du sport. La ligne d’arrivée comme une ligne de départ.
C’est une ode à l’otium romain, à la disponibilité, à la frugalité, avec l’Épicure de rappel «avec une miche de pain et une cruche d’eau, je rivalise de bonheur avec Zeus. » Et, par ici, avec un tee-shirt et une bière, je rivalise de bonheur avec Jupiter ?
Loin de l’orthodoxie économique, une autredoxie. Le Club de Rome l’avait bien dit. Tous les chemins finiront par mener à la décroissance.
La course au profit engendre des points de côté, alors un pas de côté c’est pas plus mal.
Cet essai, ce n’est pas du développement personnel mais du déploiement collectif. Notre ébriété collective doit laisser place à notre seule sobriété.
Pour développer sa pensée nourrie par un itinéraire professionnel personnel, l’autrice s’appuie sur deux récits :
– Un récit autobiographique et puissant. Celui d’un navigateur, Bernard Moitessier. Un navigateur promis à la victoire dans une course autour du monde et qui choisit de se faire David devant le Goliath de l’Exploit. Il saborde sa victoire. Avec un lance-pierre, il expédie un message sur un cargo. On put lire dessus :
« Je continue sans escale vers les îles du Pacifique, parce que je suis heureux en mer, et peut-être aussi pour sauver mon âme »
– Un récit de Romain Gary : Les Racines du ciel. Roman qui franchit lui bien la ligne d’arrivée, celle du Goncourt. Un roman en défense des éléphants et au-delà des droits de tout le vivant. Un livre dans lequel Gary utilise les mots desperados et surtout : esperados ! Un livre qui mérite peut-être pour l’occasion une lecture, non ?
Sans oublier Cassandre, Walter Benjamin, Pasolini, François Héritier, Mona Chollet et puis Gébé et son L’AN 1.
Un essai réussi à lire pour ne pas passer à côté sans grâce.
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