À lire à l’heure
« Il s’assit à l’ombre sur un banc en métal, près d’un massif de fleurs aux couleurs vives. Le garçon posa sa caisse sur le trottoir, souleva une chaussure de Martin jusqu’au cale-pied usé par les ans et se mit au travail. L’horloge de la cathédrale indiqua cinq heures, et la cloche d’une des tours sonna. Son timbre se mêla au murmure de la fontaine qui coulait dans le dos de Martin, à la rumeur paisible des voix et des sabots qui cliquetaient sur le sol. Confortablement assis, Martin ne pensait à rien et regardait vaguement les cavaliers, les attelages et les piétons qui passaient devant lui. Le cireur appliquait une crème noire qu’il frottait jusqu’à la faire pénétrer dans les marques laissées par cette longue et âpre route du Nord. »
L’Aventurier du Rio Grande de Tom Lea
ou celle-là : Le Monde selon Garp de John Irving
Au Cabaret Vert, cinq heures du soir
« Depuis huit jours, j’avais déchiré mes bottines
Aux cailloux des chemins. J’entrais à Charleroi.
− Au Cabaret-Vert : je demandai des tartines
De beurre et du jambon qui fût à moitié froid.
Bienheureux, j’allongeai les jambes sous la table
Verte : je contemplai les sujets très naïfs
De la tapisserie. − Et ce fut adorable,
Quand la fille aux tétons énormes, aux yeux vifs,
− Celle-là, ce n’est pas un baiser qui l’épeure ! −
Rieuse, m’apporta des tartines de beurre,
Du jambon tiède, dans un plat colorié,
Du jambon rose et blanc parfumé d’une gousse
D’ail, − et m’emplit la chope immense, avec sa mousse
Que dorait un rayon de soleil arriéré. » Arthur Rimbaud (1854-1891), Cahier de Douai.
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