L’ami anar, le romancier

C3z_zmAh0Own0d-Wyv-exwOlj5QSous divers pseudonymes et sur ses nombreux romans, il écrit son nom Libertaire.
Qu’on l’appelle Jean Meckert, Jean Amila, voire John Amila, il est tout un. Intègre dans son évangile vengeur de Jean ou de John. Hé, Meckert, tape un scandale !

Bien au-dessus du silence, il écrit son nom libertaire.
Les noms d’emprunt n’ont pas donné à cet ami l’anar la gloire d’un Emile Ajar. Il faut lire Les Coups, La Lune d’Omaha, Au balcon d’Hiroshima ou le Boucher des Hurlus. Nous avons les mains rouges, aussi. Il reste surtout connu des initiés. Heureusement, depuis des années, Daeninckx, Pécherot, les éditions Joëlle Losfeld et d’autres s’efforcent de lui donner la place qu’il mérite.

Sur les échos de son enfance, il écrit son nom Libertaire.
Père qu’on dit fusillé en 1917 pour mutineries dans sa tranchée.
Mère devenue folle d’amour et de rage, internée pendant deux ans. Quatre ans d’orphelinat.

Sur les sentiers éveillés, il écrit son nom Libertaire.
Ouvrier, conscrit, divers petits boulots puis il est mobilisé pendant la guerre. Son premier roman parait en 1942. Queneau, Martin du Gard et Gide l’encensent.

Sur les routes déployées, il écrit son nom Libertaire.
De la collection blanche il passe à la série noire. Des romans qui parlent de guerre, de couple sur fond d’autobiographie. Entre social et policier. Cela lui ouvre aussi les portes du cinéma. Petite manne financière que ces dialogues de sous.

Sur les marches de la mort, il écrit son nom Libertaire.
En 1971, il y a ce roman devenu introuvable (et que j’ai ! J’en reparlerai). Son titre ? La Vierge et le Taureau. Un roman sulfureux qui, à peine sorti, disparait des librairies. Retiré, racheté, R.A.S. Étrange. Pas encensé, une sorte de censure. Meckert y parle des essais nucléaires français en Polynésie. Menaces de mort, agressions, plusieurs jours dans le coma (on parle aussi de crises d’épilepsie). Qui saura ? En tout cas, au contraire du reste de son œuvre, ce roman n’a pas été réédité.

Sur la santé revenue, il écrit son nom Libertaire.
À la sortie du coma et d’un long combat, il reste amnésique. Il réapprend à vivre et à écrire. Il meurt en 1995. Ouvrir ses livres, c’est se souvenir. Peu importe la collection. Blanche (ou Noire), mais pas l’oubli.